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Historique : Documentation

LA NECESSITE DE CREER

J’anime des ateliers d’expression et de création, depuis septembre 2008 à Allevard en Isère. Ces ateliers s’adressent à tout public souhaitant développer leurs capacités d’expression et de création.

Les ateliers d'expression enfants

Pendant la première année d’ateliers, j’ai été surprise par l’élan de vie qui poussait les enfants à choisir telle matière, telle couleur et la détermination avec laquelle ils créaient. Encore aujourd’hui, lorsque je regarde les enfants créer, ils semblent savoir ce dont ils ont besoin, presque de manière physiologique. Arno STERN dans son livre « Heureux comme un enfant qui peint », développe la notion de formulation : l’enfant qui peint, formule comme par nécessité biologique.

De septembre à janvier (2008/09), j’ai proposé aux enfants différentes médiations artistiques : la terre, la peinture, puis le collage et la brico-sculpture.

De janvier à juin (2009), j’ai proposé aux enfants de construire des marionnettes (différentes techniques), de jouer derrière un castelet, puis de créer un spectacle de marionnettes. Le travail sur l’identité et la place de l’enfant a été évident. En construisant les marionnettes, les enfants exprimaient des parties d’eux mêmes. Lorsque nous avons commencé à écrire l’histoire, je percevais certains enfants angoissés. L’enjeu était de taille : comment conserver mon identité de marionnette tout en ayant une place dans le « groupe-marionnettes » ? La manière dont les enfants s’inscrivaient ou se désinscrivaient de l’histoire parlait de leur rapport au monde. Je me rappelle d’une fillette de 8 ans qui vivait en foyer pour enfants. Elle a choisi de créer une marionnette qui était une reine. Elle a pris une place importante dans le spectacle faisant d’elle, la reine du spectacle.

L’expérience d’animer un atelier d’expression enfants m’a amenée à repérer la fonction importante d’étayage narcissique du groupe. En effet, à la fin de l’atelier, je propose aux enfants de faire un cercle et de présenter leur(s) création(s). Les enfants attendent ce moment avec impatience et le vivent avec sérieux, comme à une remise de médailles. En présentant sa création, l’enfant vit la sensation d’être unique dans un groupe.

Dans les ateliers, je ne cherche pas à interpréter ou à questionner l’enfant sur sa vie. J’échange avec les enfants dans un cadre symbolique: A quoi rêve cette marionnette ? Qu’est ce qu’elle pourrait faire pour le réaliser ? Qui pourrait l’aider ? De quoi a t-elle besoin ?

Le projet de l’année 2009/2010 est de proposer aux enfants d’exprimer, par différentes médiations artistiques, les émotions : la joie, la tristesse, la colère, la peur …

Les ateliers d'expression adultes

Les ateliers de l’année 2008/09 se déroulaient en plusieurs temps : un temps de mise en condition (exercices sensori-moteurs, temps de rêverie …), un temps de création, un temps de présentation des créations, et un temps de paroles.

Les adultes sont plus inhibés que les enfants. Les temps de paroles sont nécessaires afin de lever ce qui bloque l’expression et l’élan créateur.

Au fur et à mesure des ateliers, les participants, à leur rythme, osent, jouent, expérimentent avec la matière, formulent, expriment « du dedans » au « dehors ». Certains participants parlent de l’atelier d’expression comme une nécessité presque physiologiquement (voir notion de formulation Arno STERN), d’autres évoquent des sensations d’allègement, d’apaisement, d’autres encore, expriment des états de guérisons (exemple, arrêter de fumer).

Sur l’année 2008/09, j’ai expérimenté différents ateliers, des ateliers multi médiations et des ateliers « dirigés » (tout le monde crée à partir d’une même médiation).

Certaines personnes ont apprécié d’avoir le choix dans les ateliers multi médiations plastiques (modelage, peinture, collage, brico-sculpture, écriture) . D’autres personnes ont préféré les ateliers dirigés (mandalas, land’art, musicothérapie), le chemin pour créer leur paraissait plus accessible.

Je me suis interrogée sur la progression des ateliers d’expression : en début d’année, proposer des ateliers dirigés, puis amener progressivement des ateliers multi propositions.

Le but étant d’aider à former un « groupe-matrice » suffisamment bon afin que chaque individu puisse y épanouir son être et ses capacités à créer.

Par ailleurs, j’ai évalué la fonction majeure du groupe dans l’étayage narcissique. Le groupe, « l’autre », peut faciliter l’expression du « soi ». D’une part, les temps de création à deux, à plusieurs, activent la dynamique du groupe et les capacités de création des individus. D’autre part, à la suite du temps de création, chacun présente sa création au groupe. Le regard des autres sur l’œuvre créée, est fondamentale.

Dans les ateliers 2009/10, j’ai modifié le déroulement des ateliers d’expression.

Il y a un premier temps de création et un temps de parole puis une pause. A partir des éléments du premier temps de création, les participants peuvent avoir un projet d’expression, je peux aussi suggérer des pistes de travail individualisées.

En ce début de deuxième année d’atelier, j’ai perçu le chemin parcouru des «anciens » participants. En effet, ils osent plus facilement, une confiance semble s’instaurer. Ils choisissent les matières et couleurs avec entrain, régulièrement, ils nomment et/ou mettent en place leurs désirs, ils expérimentent avec plaisir. Peut-on parler d’élan créateur retrouvé ? Peut-on parler de dés inhibition ? Peut-on parler de prophylaxies des névroses ?

D’un atelier à l’autre l’élan semble retrouvé puis à nouveau perdu. Certains participants semblent avoir été dans la vacuité précédant la création, d’autres cherchent encore. Cette notion de vacuité décrite dans le livre d’Henri Saigre « Deviens qui tu seras » est difficile à vivre, à repérer, à être nommée. Des phrases reviennent à son sujet : « je me sens perdue », « je suis dans le vide » « je ne sais pas par où commencer ». Cet espace est déstabilisant, la question de la peur de l’inconnu est souvent posée. Actuellement, mes questions sont les suivantes : Qu’est-ce qui distingue l’expression de la création ? Comment amener les participants à passer de l’expression à la création ?

 

                                 Coralie AMSTAD

  Art thérapeute

    novembre 2009